5 octobre 2008

Un sentiment bizarre…

Cher lecteur potentiel qui pourrait par le plus grand des hasards lire cet article, je m’excuse d’avance, mais pour dire ce que j’ai à dire, il me faut passer par une étape racontage de vie personnelle et tout à fait inintéressante. Pour me rattraper, je vous promets de traiter une question existentielle la prochaine fois.

Je recadre l’élément malveillant et malvenu dans son contexte : cette année pour la rédaction de mon mémoire de recherche, je dois choisir un thème et l’enseignant associé à celui-ci. Je me suis donc rendue à la réunion de présentation des thèmes et des professeurs. Tout naïve que je suis, je croyais qu’il s’agissait d’une réunion d’information, et à ce moment là je ne savais pas encore à quel point je m’étais fourvoyée.
La présentation a due durer dix minutes au bas mot, et encore je suis bien généreuse. Après ce laps de temps relativement court de demi écoute (une partie de mon cerveau ne pensant qu’au week-end qui l’attendait), j’ai eu la surprise effarante d’entendre qu’il fallait venir interroger soi-même les enseignants, et donc se déplacer pour se rapprocher, et… et… leur parler.

Cette dernière chose me paraissait tout à fait inconcevable pour deux raisons :
- les enseignants descendaient enfin de leur tour d’ivoire pour s’entretenir avec nous, les petites sous-merdes estudiantines auxquelles ils n’avaient apporté aucune attention les trois années précédentes… il était temps…
- je dispose d’une timidité résistante à toutes épreuves et assez extravagante puisqu’elle ne s’applique qu’à certaines catégories de gens, catégories dont les enseignants ont toujours fait parti. (les coiffeuses en étaient aussi membres à une époque, mais ceci est un souvenir lointain désormais… encore que).

Bref, c’est à ce moment là, alors que tous les étudiants présents se dirigeaient avidement vers des professeurs, qu’est arrivé l’évènement à tendance hautement dramatique qui m’a poussé à écrire ces modestes lignes :
Je me suis posé la question : « Mais qu’est-ce que je fiche ici beurdel ? »
Quelle sensation vraiment indélicate qui s’empare de nous à l’encontre de notre plein gré…
Imaginez, si cela ne vous est encore jamais arrivé (et dans ce cas je vous admire. Pour les autres, visiblement vous vous en êtes sorti, toutes mes félicitations), imaginez donc que vous vous retrouviez soudainement dans un monde qui vous est totalement inconnu, alors que vous êtes supposés le connaître.
Les autres, qui ont débarqué dans ce monde en même temps que vous, se sont très vite adaptés. Et pas vous. Et là, vous vous sentez juste minable. Minable de ne pas vous être renseigné plus tôt et de n’avoir donc aucune question, minable de n’être attiré par aucun thème puisque vous ne les connaissez pas assez (l’attirance pour les profs par contre… ce n’est pas le sujet ici), et minable en se comparant aux autres qui ont tout compris, qui ont entrepris la démarche adéquate, et qui gardent une large longueur d’avance sur vous.

Cher lecteur, si tu te retrouves dans ce cas (je compatis), il s’offre à toi tout un large panel de solutions contrairement à ce que tu peux croire, mais qui ne sont pas toutes appropriées.
La première, celle à laquelle tout le monde pense en ce moment fatidique, est tout naturellement de partir, de fuir très loin, d’oublier cette humiliation et de pouvoir tourner la page, pour ensuite prétendre que cela n’est jamais arrivé.
Oui, tu peux choisir cette solution. Mais je ne te le conseille pas. Moi-même, j’y ai pensé une bonne vingtaine de fois, mais comme c’était toute mon année universitaire qui était en jeu, j’ai préféré m’abstenir de cette délivrance.
Tu peux aussi, subitement, découvrir un élément extraordinairement intéressant sur ton ongle (« oh tient, mon ongle a un creux à cet endroit précis, je vais voir si il n’y en a pas ailleurs. »). Ensuite, prends le temps de bien regarder le diaporama qui passe en boucle au tableau depuis un moment suffisant pour que tu en ais déjà tiré toutes les informations utiles. On ne sait jamais, tu pourrais être passé à côté de quelque chose par mégarde…
Et puis, la meilleure solution pour ton avenir, celle que je te conseille puisque je suis tout à fait bienveillante, est de te lever, de prendre ton courage à deux mains (sans toutefois tomber dans la perversité en t’affichant la main au caleçon devant tout le monde), et de te diriger vers un groupe d’élèves entourant un enseignant. Attention ! La notion de groupe ici est très importante. Tout simplement parce-que si un professeur est tout seul, tu prends un risque, celui de devoir poser une question comme introduction à la conversation. Et je te donne un deuxième risque parce-que c’est cadeau : tu vas te retrouver en face d’une seule personne que tu devras écouter soigneusement, qui te regardera dans les yeux sans discontinuer, et que tu devras relancer lorsqu’il ne saura plus quoi dire.

Tu vas donc vers un groupe, et tu t’insères discrètement. Tu prends un air intéressé, tu hoches la tête quand il faut, clignes des yeux quand il faut, et esquisse un sourire quand il faut. Et là, au bout d’un moment, non seulement tu te rends compte que le gars en face, ben il parle en français, mais qu’en plus ce qu’il dit est intéressant.

Et là, ça y est. Tu as vaincu ton complexes « Que fais-je donc ici ? », tu as réussit à t’adapter à l’environnement hostile qui t’entoure, à te remettre au niveau des autres, et tu te sent soudainement revalorisé.
A ce moment là, si tu veux essayer de dépasser tes limites, tu peux te lancer dans une discussion avec un enseignant n’ayant pas de cercle d’étudiants autour de lui.

Et si tu veux vraiment arriver au summum de la fierté, il te suffit de jeter un coup d’œil dans la salle. Tu remarqueras qu’il y en a qui n’ont toujours pas dépassé ça, et qui se tâtent activement à partir tout en regardant fixement le diaporama qui défile en boucle au tableau. Là, tu es vraiment content d’avoir réussit à faire un premier pas, puis un autre, jusqu’à savoir marcher, en te disant que qu’en plus tu as perdu cet air con que l’autre affiche en ce moment.

Tu sorts de là avec une estime de toi au renforcée et une confiance renouvelée. Mais il te reste quand même la petite boule au ventre qu’a produit le : « qu’est-ce je fiche ici ? » et qui ne disparaîtra que quand tu seras reparti.

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